LE PARADOXE D'OLBERS,

ou pourquoi la nuit est-elle noire ?

            JOHANNES KEPLER et HEINRICH M.W. OLBERS, cent cinquante ans plus tard, ont noté que l'obscurité du ciel nocturne était paradoxale. Entre Kepler et Olbers, bien des découvertes ont permis de révéler l’ampleur du problème : la gravitation, de nouvelles observations du ciel, des outils mathématiques plus puissants… Olbers démontre que même si comme dans une forêt, les étoiles les plus proches cachent en partie les plus lointaines, 1'ensemble devrait recouvrir exactement la voûte céleste, sans laisser un seul endroit par où apparaîtrait le fond du ciel. Le tout brillerait comme cent mille soleils... On tente de résoudre le paradoxe en faisant appel à des nuages de poussières flottant entre les étoiles, qui masqueraient ce rayonnement éblouissant. Mais ça ne marche pas : les nuages absorberaient le rayonnement et se mettraient à luire de la même façon. Le paradoxe est resté ouvert un siècle durant, et les savants contemplaient le soir un ciel qui restait, malgré leurs calculs, obscur. Une explication satisfaisante est fournie par l'expansion de l'Univers, découverte vers 1920. Le Cosmos s'agrandit sans cesse, sous l'effet de l'effet de l’explosion initiale. Plus les objets sont éloignés de nous, plus ils s'éloignent rapidement. Les objets les plus lointains s'éloignent presque à la vitesse de la lumière : la lumière qui s’en échappe ne peut pas nous parvenir. Un phénomène qui peut être décrit de deux façons, selon que la lumière est vue comme une particule ou comme une onde. Dans le premier cas, une étoile lointaine s'éloigne de nous à très grande vitesse. Elle émet des particules en sens inverse, à vitesse égale. Par rapport à nous, elles sont pratiquement immobiles, et ne nous parviennent jamais. L'analogie est explicite, mais grossière. La lumière n'est jamais immobile : quelles que soient les conditions où on l'observe, sa vitesse est même. Une explication ondulatoire est un peu plus compliquée, niais beaucoup plus satisfaisante. Entre l'émission de deux ondes lumineuses, l'objet s'est éloigné d'une certaine distance. Pour nous à partir de la Terre, la distance entre les deux ondes s'est accrue d'autant la lumière en est décalée vers le rouge. A partir d'une certaine vitesse, elle passe dans l'infrarouge, et devient invisible : l'œil n'est pas sensible au rayonnement des objets les plus lointains.

            Si la dimension de l'Univers est importante, son âge, inconnu de Kepler et d'Olbers entre aussi en ligne de compte. Même si l'expansion n'avait pas lieu, le temps écoulé depuis le big-bang serait bien insuffisant pour permettre aux étoiles de le "remplir de lumière ".

            L'expansion de l'Univers permet l'existence de réactions physiques et chimiques dégageant de la chaleur - donc, de la combustion des étoiles, de l'apparition de molécules complexes - et de l'apparition de la vie. Si l'Univers ne s’agrandissait pas toutes les chaleur et lumière émises par de telles réactions finiraient par le remplir. Il deviendrait, corne le prédisaient Kepler et Olbers, aussi brillant que le Soleil et tout aussi chaud... Les étoiles s'y fondraient, les poètes ne pourraient exister, et à plus forte raison la vie. Toute l'évolution cosmique demande un endroit pour évacuer la chaleur produite par les phénomènes physiques. C'est l'expansion de l'Univers qui créée cet espace. Comme une baignoire que l'on remplit, mais dont les parois s'écartent sans cesse, l'Univers ne sera jamais plein de la lumière des astres.

 

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